No 243 – série 2024-2025

Évangile du vendredi 23 mai 5e semaine de Pâques

« Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres » (Jn 15, 12-17)

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous alliez, que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure. Alors, tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous le donnera. Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres. »

Texte d’Évangile tiré du Prions en Église. S’abonner au Prions.

Méditation – Abattre les murs, tendre des ponts, garder le nord

En commençant cette méditation, je m’arrête un instant pour laisser résonner en moi, depuis le cœur de l’Évangile, cet appel profond de Jésus : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. »

De quelle façon cette parole constitue-t-elle pour moi un repère qui guide mon chemin de vie ?

Un tel questionnement sur l’impératif de l’amour, lorsqu’on y réfléchit, n’est jamais définitivement accompli. Il se déploie au quotidien, dans les conditions bien concrètes de notre existence, et exige d’être revisité fréquemment, avec lucidité. Comment dois-je aimer ? De quelle façon puis-je traduire, dans mes gestes et mes paroles, ce don de soi auquel je suis invité ? Mais aussi, jusqu’où dois-je l’étendre ? Et envers qui ?

L’amour auquel nous convie Jésus n’a rien d’un sentiment éthéré ou d’un souhait nébuleux. Il relève d’une prise de position qui s’impose à nous et nous mobilise à chaque instant. En réalité, l’appel à l’amour du prochain agit comme une boussole que l’on doit reconsulter constamment, au gré de nos pas et de nos détours, face aux embûches, aux rencontres et aux défis que notre époque nous présente. Déconcertant parfois, l’amour semble faire de nous des éternels débutants.

Mais aimer peut-il vraiment relever d’un « commandement » ? Faisant écho aux Commandements transmis par Moïse, la nouveauté du message de Jésus réside dans la puissante interpellation qu’il porte. Jésus nous invite à une transformation intérieure dont l’amour est le fondement. Cela signifie que notre connaissance de Dieu et notre relation avec lui empruntent le chemin de l’amour du prochain, qui s’exprime au quotidien à travers la bienveillance, l’empathie et la miséricorde. Il en fait le lieu premier de notre relation au Père. « Bien-aimés, aimons-nous les uns les autres, puisque l’amour vient de Dieu. Celui qui aime est né de Dieu et connaît Dieu », écrivait saint Jean dans sa Première lettre[1].

L’appel de Jésus à « donner sa vie pour ceux qu’on aime » a récemment été détourné par des leaders autocrates pour légitimer une vision réduite de l’amour, limité à notre cercle immédiat. Le pape François s’est fermement opposé à de telles manipulations du message évangélique, destinées à justifier des politiques de fermeture qui insinuent l’existence de deux catégories d’êtres humains : d’un côté, les « nôtres », ceux qui appartiennent à notre clan, et de l’autre, « ceux qui seraient moins précieux, moins importants ou moins humains » [2]. L’amour est inclusion et accueil , clamait François. Dans cette époque de bouleversements inquiétants, le pape était bien conscient que le défi de l’amour du prochain passe nécessairement par la construction de ponts entre les êtres humains et la destruction des murs qui les isolent. Dans l’un de ces derniers écrits, soit sa Lettre aux évêques américains, François rappelait avec force le message qui l’a habité depuis son premier voyage hors du Vatican, lorsqu’il s’était rendu sur l’île de Lampedusa à la rencontre des réfugiés de la mer : « Nous sommes appelés, avec charité et clarté, à vivre dans la solidarité et la fraternité, à jeter des ponts qui nous rapprochent toujours plus, à rejeter les murs d’ignominie et à apprendre à donner nos vies comme Jésus-Christ a donné la sienne pour le salut de tous. » Déjà, dans son encyclique Fratelli Tutti, il avait souligné que les défis globaux auxquels notre humanité est confrontée requièrent une « fraternité ouverte qui permet de reconnaître, de valoriser et d’aimer chaque personne, indépendamment de la proximité physique, peu importe où elle est née ou habite » [3].

Les premiers mots du pape Léon, dès son avènement, ont témoigné de la même lucidité. Face à la fragilisation périlleuse de l’équilibre mondial, il a lancé un vibrant appel à la paix et exhorté à tendre des ponts.

En sortant de cette méditation, je peux me proposer de consulter assidûment la boussole de l’amour fraternel. Je demande à l’Esprit de m’aider à y revenir régulièrement, afin de ne jamais perdre le nord.

Michel Rondeau – mikeround62@gmail.com


[1] 1 Jean 4,7

[2] Lettre du  Pape François aux évêques des États-Unis d’Amérique.  (2025) Paragraphe 8

[3] Pape François. Fratelli Tutti: Lettre Encyclique du Saint-Père François sur la fraternité et l’amitié sociale. (2023), Paragraphe 1.


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