No 264 – série 2024-2025

Évangile du vendredi 13 juin 10ème semaine du temps ordinaire

« Tout homme qui regarde une femme avec convoitise a déjà commis l’adultère » (Mt 5, 27-32)

   En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples :
    « Vous avez appris qu’il a été dit :
Tu ne commettras pas d’adultère.
    Eh bien ! moi, je vous dis :
Tout homme qui regarde une femme avec convoitise
a déjà commis l’adultère avec elle dans son cœur.
    Si ton œil droit entraîne ta chute,
arrache-le et jette-le loin de toi,
car mieux vaut pour toi perdre un de tes membres
que d’avoir ton corps tout entier jeté dans la géhenne.
    Et si ta main droite entraîne ta chute,
coupe-la et jette-la loin de toi,
car mieux vaut pour toi perdre un de tes membres
que d’avoir ton corps tout entier qui s’en aille dans la géhenne.

    Il a été dit également :
Si quelqu’un renvoie sa femme,
qu’il lui donne un acte de répudiation.

    Eh bien ! moi, je vous dis :
Tout homme qui renvoie sa femme,
sauf en cas d’union illégitime,
la pousse à l’adultère ;
et si quelqu’un épouse une femme renvoyée,
il est adultère. »

Texte d’Évangile tiré du Prions en Église. S’abonner au Prions.

Veuillez noter que nous terminerons nos méditations ce dimanche 22 juin et que nous les reprendrons le lundi 8 septembre. Nous vous remercions de nous avoir lu durant toute cette année et nous espérons vous revoir en septembre. Bonnes vacances et que Dieu vous accompagne ! Alice (celle qui prête sa voix aux méditations), Barbara, Dany, Halyna, Laurence, Marie-Emmanuel, Martial, Michel, Paolo, Stéfan et Vincent

Méditation – Un appel à la pureté du cœur

Dans l’Évangile d’aujourd’hui, deux formulations attirent mon attention : « il a été dit… » et « moi, je dis ». La première formule fait référence à la loi, au commandement confié par Dieu à Moïse, qui constitue un guide moral sur le chemin de l’homme. Le Christ n’abolit pas cette loi (cf. Mt 5, 17), mais avec la formule « moi, je dis » il semble nous amener à un autre niveau et nous révéler une autre dimension de la fidélité à Dieu. Il parle de l’importance du regard. Cependant, il ne s’agit pas seulement de la vision extérieure, du sens de la vue. Il parle de l’importance de ce qui émane de l’intérieur, du cœur de la personne.

J’avoue que ce texte biblique m’est apparu sous un nouveau jour après m’être plongé dans la théologie du corps, un recueil de catéchèses de saint Jean-Paul II, prononcées au début de son pontificat. J’aimerais vous partager quelques aspects que je trouve très importants.

Le Discours sur la montagne et en particulier ce passage médité aujourd’hui, fait partie de la proclamation du nouvel éthos: l’éthos de l’Évangile qui ne se limite pas à la conformité extérieure à la loi, mais fait appel au « cœur » humain. Cet appel est universel : « l’homme de tous les temps et de tous les lieux se sent appelé de manière adéquate concrète et unique: parce que, justement, le Christ fait appel au « cœur » humain qui ne peut être sujet à aucune généralisation » (TDC 34)[1].

C’est un appel à la pureté du cœur qui consiste dans la capacité de participer à la vision divine : « Dieu vit tout ce qu’il avait fait et voici que c’était très bien » (Gn 1,31), à voir avec les yeux intérieurs. C’est le cœur pur qui capte les inspirations de l’Esprit, qui s’ouvre à la lumière de la Parole, qui voix toute chose comme Dieu avait créé. Le Christ trouve pertinent de nous rappeler ce mystère de la création dans sa simplicité et dans ses richesses originelles (cf. Gn 1-2). Dans la création tout parle du don de Dieu : le monde, les créatures, les êtres humains, leurs corps, leurs capacité d’aimer, leurs capacité de se donner, leurs liberté etc. Le don, c’est la parole-clé qui pourra nous aider à saisir l’essentiel de l’éthos de l’Évangile dans le contexte des relations entre homme et femme. Les deux ont été créés à l’image de Dieu et ils ne peuvent se retrouver pleinement si ce n’est à travers un don désintéressé de leurs-mêmes.

Le corps humain qui est un élément visible, révèle ce qui est invisible dans la personne, et ainsi participe au don sincère de la personne. Autrement dit, le corps possède une signification « conjugale » : il permet à homme et femme d’être « une seule chair » (Gn 2,24) et ainsi à devenir co-créateurs avec Dieu. D’une part, cette signification indique une capacité particulière d’exprimer l’amour dans lequel l’être humain devient don. D’autre part y correspond sa profonde disponibilité à l’« affirmation de la personne », à la reconnaissance de sa pure valeur, de sa dignité et de son unicité, basée sur le fait que Dieu l’a voulue pour elle-même (cf. TDC 15). Grâce à cette capacité de se donner et d’accueillir le don de l’autre, les personnes peuvent exister dans la communion des personnes à l’image de Dieu.

C’est de cette manière qu’on peut appréhender le risque que représente la concupiscence, qui limite et déforme le mode d’exister du corps auquel l’homme participe.  « Le « cœur »  humain expérimente le degré de cette limitation ou cette déformation, surtout dans le cadre des rapports réciproques homme-femme. C’est précisément dans l’expérience du « cœur » que la féminité et la masculinité, dans leurs rapports réciproques, semblent n’être plus l’expression de l’esprit qui tend à la communion personnelle et elles restent seulement objet d’attraction (…) La concupiscence touche précisément ce « don désintéressé » : il enlève à l’homme, si l’on peut dire, la dignité du don qui se trouve exprimée par son corps à travers la féminité et la masculinité et, dans un certain sens, « dépersonnalise » l’homme en le faisant objet « pour l’autre ». Au lieu d’être « avec l’autre » – sujet dans l’unité, même dans « l’unité sacramentelle du corps », – l’être humain devient un objet: la femme pour l’homme et vice versa (…) La concupiscence comporte la perte de la liberté intérieure du don. Elle n’est pas capable de promouvoir l’union comme communion des personnes. À elle seule, elle n’unit pas, mais elle s’approprie. Le rapport du don se transforme dans un rapport d’appropriation » (TDC 32). Si l’homme se réfère à la femme en la considérant seulement comme un objet à prendre en possession, et non pas comme un don, il se condamne en même temps à devenir lui-même pour elle non pas un don, mais seulement un objet d’appropriation.

Cette chosification de la personne, sa réduction à l’état d’un objet sexuel, même par un seul regard, semble très grave dans les yeux du Christ. Regarder avec convoitise, c’est diminuer la personne, ce n’est plus voir sa valeur propre, mais seulement le plaisir qu’elle peut procurer. En ce regard manque d’amour. La catégorie de l’usage prend la place de celle du don; l’ordre créé par l’homme déchu prend la place de l’ordre créé par Dieu. Voyant cela, le Christ veut redresser ces déformations. D’ici son appel à la pureté du cœur qui est la participation à la vision de Dieu.

En même le Christ prévient de se tenir loin de ce qui provoque la chute : il vaut mieux perdre un de ses membres que d’avoir le corps tout entier jeté dans la géhenne, c’est-à-dire de se perdre. La géhenne est une vallée au sud de Jérusalem, connue pour avoir été le site de sacrifices d’enfants dédiés au dieu Moloch. Le feu de ces offrandes a toujours été le signe du châtiment pour ceux qui rejettent le salut divin, et la géhenne est décrite dans le Nouveau Testament comme un lieu de malédiction. L’image de la géhenne est fréquemment associée à celle de l’enfer. Qu’est-ce que l’enfer à la fin de compte ? L’enfer, c’est de ne plus aimer, disait Georges Bernanos dans « Le journal d’un curé de campagne ». Prenons donc soin de nos cœurs, c’est là où le paradis ou l’enfer tissent ses racines.

Halyna Kryshtal – hkryshtal@lepelerin.org


[1] Toutes les citations sont tirées de la version numérique des catéchèses de la Théologie du corps disponible sur le site : https://www.theologieducorps.fr/tdc/theologie-du-corps-catecheses Le numéro renvoie à la catéchèse à laquelle il est fait référence.


Événements en vedette





DROIT D’AUTEUR

La méditation peut être partagée à toutes et à tous, en tout ou en partie, mais le nom de l’auteur et l’indication du centre le Pèlerin avec l’adresse du site (www.lepelerin.org) doivent être inscrits, car les droits d’auteur demeurent. Merci de votre compréhension.