No 249 – série 2024-2025
Évangile du jeudi 29 mai – 6e semaine de Pâques
« Vous serez dans la peine, mais votre peine se changera en joie » (Jn 16, 16-20)
En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples :
« Encore un peu de temps, et vous ne me verrez plus ;
encore un peu de temps, et vous me reverrez. »
Alors, certains de ses disciples se dirent entre eux :
« Que veut-il nous dire par là :
“Encore un peu de temps, et vous ne me verrez plus ;
encore un peu de temps, et vous me reverrez.”
Et puis :
“Je m’en vais auprès du Père” ? »
Ils disaient donc :
« Que veut dire : un peu de temps ?
Nous ne savons pas de quoi il parle. »
Jésus comprit qu’ils voulaient l’interroger, et il leur dit :
« Vous discutez entre vous parce que j’ai dit :
“Encore un peu de temps, et vous ne me verrez plus ;
encore un peu de temps, et vous me reverrez.”
Amen, amen, je vous le dis :
vous allez pleurer et vous lamenter,
tandis que le monde se réjouira ;
vous serez dans la peine,
mais votre peine se changera en joie. »
Texte d’Évangile tiré du Prions en Église. S’abonner au Prions.
Avis : Les versions audio des méditations ne seront exceptionnellement pas disponibles les mercredi 29, jeudi 30 et vendredi 31 mai. Merci de votre compréhension, et n’hésitez pas à poursuivre la lecture des textes en version écrite.
Méditation – Encore un peu de temps…
Encore un peu de temps, et vous ne me verrez plus; encore un peu de temps et vous me reverrez… Cette Parole de ce qui s’annonce et de ce qui s’est déjà évanoui me fait proche, tout proche des personnes qui, autour de moi et en moi, avancent en âge, me devancent dans le large.
Grands-mères, vieil oncle, aieux, ancêtres, tous ceux et celles que l’on nomme ici des aînés m’ont vue avant que je ne les voie. Avant que je reconnaisse qu’ils sont devant moi, parfois de plusieurs pas mais certainement pas derrière. Ils et elles ont traversé, résisté, chanté, ployé, dansé et grandi en la vie, en ce chemin vivant donné et tant reçu dans lequel je m’inscris et avance à mon tour. Bien sûr, je les perdrai de vue, je ne les verrai plus parce que j’aurai oublié que ce chœur d’enfants ridés qui me précèdent à l’âge de leur âme. Ils sont devant, elles sont annonce, encore un peu de temps. Depuis notre temps apparemment si important, ils et elles sont perçus comme un fardeau, isolés par un confort sans réconfort misérablement distrayant; un confort évidé de sens, évidé de vie; nous nous empressons d’ailleurs de les aider à mourir. Encore un peu de temps pour disparaître, ni vu ni reconnu, dans l’indifférence et l’affairement. Qui donc se préoccupe du Vivant qui les habite avec mémoire et ténacité, qui se soucie de ces personnes profondément plus vivantes que moi alors qu’elles sont plongées plus en avant dans ce monde qui nous appartient autant à elles qu’à moi ? Elles et moi partageons pourtant le même présent, elles et moi sommes les enfants de quelqu’un, elles et moi avons été amoureusement créées par le même Dieu, que nous portons de commencements en commencements.
Encore un peu de temps et je reverrai ces enfants déjà grands, devant ces cœurs qui auront palpité plus de 2,9 milliards de fois. Je les reverrai car j’aurai re-connu le fils et la fille bien-aimé.e de mon Père. Je les re-garderai près de moi pour protéger ce Dieu qui continue de naître en eux malgré le peu de temps qu’il reste. C’est là notre vocation à nous qui sommes derrière, héritiers et éclairés par leurs lueurs et par leur lumière. De l’empreinte fugace de leur existence à la lumière infinie de leur présence, du temps, il en restera éternellement suffisamment pour que le Père y enfouisse tout son amour. Protégeons leur dignité, ces personnes accueillent tout l’amour de Dieu et donc tout l’amour du monde. Avant nous elles entrent en eau profonde.
Encore un peu de temps dans l’humble avancée de ma marche au côté de leur sage humanité pour que je puisse saisir qu’ils ont l’âge de leur âme. L’âge de cette âme vivifiante qui a toujours l’impression qu’elle vient d’arriver. L’âge d’une âme si brûlante et intemporelle qu’elle serait étonnée de constater qu’on croit qu’elle peut s’éteindre dans ces personnes dites âgées.
Encore un peu de temps et je ne les verrai plus, donne-moi un peu de temps Seigneur, pour m’accorder ton regard à travers tes enfants ridés, délaissés et si vivants. Donne-moi un peu de temps Seigneur et je te reverrai à travers tes enfants ridés, emportés et si riants. Donne-nous encore un peu de temps Seigneur…
Barbara Martel – bmartel@lepelerin.org
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