No 48 – série 2025-2026
Évangile du jeudi 23 octobre 2025 – 29e semaine du temps ordinaire
« Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division » (Lc 12, 49-53)
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli ! Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division. Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées : trois contre deux et deux contre trois ; ils se diviseront : le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille contre la belle-mère. »
Texte d’Évangile tiré du Prions en Église. S’abonner au Prions.
Méditation – Bonté de feu
Un Dieu qui apporte le feu, la division et prédit le déchirement des familles! L’image de Jésus portant un agneau sur ses épaules ou lavant les pieds de ses disciples paraît se dissiper devant la dureté de la Parole de ce matin. Lorsque je méditais le passage de la semaine dernière qui écorchait tout autant; seule la résistance spirituelle à la dévastation du monde s’imposait à ma prière, à mon esprit, teintant mes mots de sens et de justesse. D’ailleurs, un peu plus loin dans l’Évangile de Luc, Jésus déclare : « Celui qui n’a pas d’épée, qu’il vende son manteau pour en acheter une! (Lc22.36b) » Jésus refusera les deux épées apportées par les disciples comme il réprimandera Pierre d’avoir tenté de le secourir lors de son arrestation. Guérissant l’oreille coupée du serviteur du grand prêtre et laissant là les pots cassés de l’image de soi. Comme nous le rappelle Lytta Basset, « Tel est son chemin de vie, qui peut devenir le nôtre : aller jusqu’à la mort de l’image de soi. Accepter d’être pris et condamné pour ce qu’on n’est pas. (Paroles de feu, 2025, p. 96) ».
Goûter au feu du Christ, passer au creuset de la conversion, être allumé de foi : c’est laisser s’enflammer nos oripeaux sous l’impulsion de l’amour. Ce manteau défraîchi, ajusté à l’étroitesse et taille de notre enfant blessé. Cet enfant blessé, pourvu d’un reste de splendeur donnant désormais un aspect théâtral et parfois ridicule à l’adulte devenu. Cette armure de respectabilité fabriquée, cette sous-personnalité cousue d’enfance et de blessures, ces rôles que l’on porte comme autant d’accessoires qui déguisent l’identité profonde. Cette identité profonde, filiale à laquelle Jésus nous invite, c’est au tranchant du courage d’être qu’elle peut enfin se dénuder. C’est au discernement du non-mensonge et de la non-violence que l’image de soi s’étiole pour révéler le don unique que je suis, la parole vivante que j’incarne dans l’Unique Parole qu’est le Christ.
Forcément, en accompagnement spirituel, laisser le manteau dans le tombeau et l’image idolâtrée tissé de nos enfermements sécurisants, n’ira pas de soi. Quitter librement la scène familiale et son déni, cesser sciemment le jeu des relations mal ajustées pour arpenter en vérité un chemin de pauvreté et d’intégrité divisera. « Nous ne te reconnaissons plus! » entend-on souvent des personnes accompagnées qui entrent dans le monde comme ils entrent dans leur identité filiale. À tout moment, elles vivent désormais le temps du choix où se joue, chaque fois, l’avenir du monde. À tout instant, dépouillés, nous devons nous demander suis-je ici et maintenant le gardien de mon frère, de ma sœur, sans lien de sang, sans reconnaissance pour autant ? Consentir à répondre à l’injustice, à l’oppression de celle qui, pourtant, n’est pas ma mère, demande du courage d’être en vérité et en vulnérabilité. Le sens s’éclaire, l’amour éclot, tout simplement parce que nous partageons l’humaine misère. Se donner, jusqu’à sa vie, pour aider cet autrui qui n’est pas mon père ni un proche mais par fidélité à l’amour, divisera. Il s’agit de résister, encore, à la dévastation du monde pour, qu’à travers le don de qui je suis en vérité et pour l’autre, émerge la bonté qui nous unit. Pour qu’émerge, malgré les manteaux boutonnés, les images de soi bricolées et les familles repliées, la bonté de Celui qui nous habite et par lequel Je suis. Sans mensonge, sans violence et en pleine lumière, c’est Sa bonté, seule, qui libère.
Barbara Martel – bmartel@lepelerin.org
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