No 233 – série 2024-2025

Évangile du mardi 13 mai 4e semaine de Pâques

« Le Père et moi, nous sommes UN » (Jn 10, 22-30)

On célébrait la fête de la dédicace du Temple à Jérusalem. C’était l’hiver. Jésus allait et venait dans le Temple, sous la colonnade de Salomon. Les Juifs firent cercle autour de lui ; ils lui disaient : « Combien de temps vas-tu nous tenir en haleine ? Si c’est toi le Christ, dis-le nous ouvertement ! » Jésus leur répondit : « Je vous l’ai dit, et vous ne croyez pas. Les œuvres que je fais, moi, au nom de mon Père, voilà ce qui me rend témoignage. Mais vous, vous ne croyez pas, parce que vous n’êtes pas de mes brebis. Mes brebis écoutent ma voix ; moi, je les connais, et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle : jamais elles ne périront, et personne ne les arrachera de ma main. Mon Père, qui me les a données, est plus grand que tout, et personne ne peut les arracher de la main du Père. Le Père et moi, nous sommes UN. »

Texte d’Évangile tiré du Prions en Église. S’abonner au Prions.

Veuillez noter que les méditations en format audio sont temporairement indisponibles et seront de retour à partir de la semaine du 12 mai. Merci de votre compréhension !

Méditation – Dieu ne sait compter que jusqu’à UN

En Dieu, le Père et le Fils, ça ne fait pas deux : « Le Père et moi, nous sommes un. » Dans l’Esprit, le Père et le Fils sont UN. On le sait Dieu est nul en comptabilité ! Dans la parabole de l’ouvrier de la dernière heure (Mt, 20,1-16),  le maître de maison donne un denier aux premiers ouvriers qui peinent tout le jour comme aux derniers ouvriers qui débutent leur labeur à la tombée du jour. Aux hommes qui comptent leurs heures de travail sous le soleil, Dieu répond par l’unité de Son amour et donne UN denier. Cette remise en question du calcul affole notre raison comptable. Derrière ce trouble se cache un grand mystère : qu’est-ce qu’être UN ?

Dans la logique du monde, « un » est un élément isolé à l’écart d’un autre. Compter consiste à ajouter un élément séparé à un autre élément séparé. L’addition des éléments ne met pas un terme à leur séparation : on additionne les pommes de terre dans un sac sans abolir le fait qu’une pomme de terre reste séparée d’une autre pomme de terre voisine. Pour les pommes de terre, la solution est toute trouvée : on peut faire une purée ! En écrasant tout, la solitude est dépassée… Pour les sociétés humaines, les hommes ont tenté cette solution en construisant la tour de Babel (Gn 11, 1-9). Avec le bitume qui colmate les brèches, avec le mortier qui soude des briques, les hommes pensaient produire de l’unité (Gn, 11,3). Mais, en additionnant les briques compactes les unes aux autres, les constructeurs ne produisirent qu’une immense tour monolithique et brutale. Un bloc solitaire et sans visage montait vers le ciel. Le peintre flamand Brueghel peignit un grand tableau représentant une tour de Babel (1). À gauche du tableau, tout en bas, le roi bâtisseur est honoré par des ouvriers petits comme des insectes rampants. Le gigantisme de la tour se paie par l’annihilation des personnes.

Pour abolir la séparation, les hommes inventent des fusions, des transes dans lesquelles tous se perdent dans une confusion psychique. L’un ne perd sa solitude qu’en perdant la conscience de soi. Chacun dilué dans la masse semble dire : « Je ne suis plus seul, puisque je ne suis plus personne ! ». C’est la confusion des identités, le mélange des individualités dans lequel la vie personnelle est perdue. 

Dans la logique de Dieu, l’unité s’acquiert dans la communion. C’est la qualité de la vie relationnelle qui fonde l’unité des personnes. Le pluriel des personnes appelle le singulier de l’unité. Et l’unité vit du dialogue. La comptabilité divine repose sur la logique de l’amour. En Dieu, le UN n’est pas un élément séparé d’un autre élément comme cela est le cas dans le monde des choses. En Dieu, le UN est la rencontre de plusieurs dans l’amour.

La logique de l’amour est don et réception du don, élan de soi vers l’autre et acceptation du don de l’autre. S’il n’y a pas d’autre, il n’y a pas de don… et pas d’amour. « Si l’amour est don et accueil, il faut bien qu’il y ait plusieurs personnes en Dieu. On ne se donne pas à soi-même, on ne s’accueille pas soi-même. La vie de Dieu est cette vie d’accueil et de don. Le Père n’est que mouvement vers le Fils, Il n’est que par le Fils. » (2) Les mots mêmes de « Père », de « Fils » désignent des relations. Le Père n’est Père que face au Fils. Le Fils reçoit sa filiation du Père. Ces vérités divines sont d’une immense conséquence pour notre vie humaine. « La vie de Dieu étant dans cette vie d’accueil et de don, puisque je dois devenir ce qu’est Dieu, je ne vais pas vouloir être un homme solitaire. Si je suis un homme solitaire, je ne ressemble pas à Dieu. Et si je ne ressemble pas à Dieu, il ne sera pas question pour moi de partager sa vie éternellement. » (2)

Tout le cosmos redit cette vérité divine de l’amour : l’homme et la femme sont UN parce qu’ils sont dans un face-à-face amoureux. Un homme sans vis-à-vis n’est pas UN. L’individu qui tourne sur lui-même n’est pas UN, il est seul. La pluralité appelle l’unité dans l’amour comme un défi impossible sans l’action miraculeuse de l’Esprit. Le miracle de l’unité suppose une écoute : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’Un ». (Dt 6,4). L’homme et la femme comme « deux brebis écoutent » la voix du Pasteur divin qui « donne la vie éternelle ».  

Vincent REIFFSTECK – vincent.reiffsteck@wanadoo.fr

Note :

(1) La tour de Babel de Pieter Brueghel vers 1563.
(2) Père François Varillon, Joie de croire, joie de vivre, (p.28).




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