No 83 – série 2025-2026

Évangile du jeudi 27 novembre 2025 – 34e semaine du temps ordinaire

« Jérusalem sera foulée aux pieds par des païens, jusqu’à ce que leur temps soit accompli » (Lc 21, 20-28)

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Quand vous verrez Jérusalem encerclée par des armées, alors sachez que sa dévastation approche. Alors, ceux qui seront en Judée, qu’ils s’enfuient dans les montagnes ; ceux qui seront à l’intérieur de la ville, qu’ils s’en éloignent ; ceux qui seront à la campagne, qu’ils ne rentrent pas en ville, car ce seront des jours où justice sera faite pour que soit accomplie toute l’Écriture. Quel malheur pour les femmes qui seront enceintes et celles qui allaiteront en ces jours-là, car il y aura un grand désarroi dans le pays, une grande colère contre ce peuple. Ils tomberont sous le tranchant de l’épée, ils seront emmenés en captivité dans toutes les nations ; Jérusalem sera foulée aux pieds par des païens, jusqu’à ce que leur temps soit accompli. Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées et désemparées par le fracas de la mer et des flots. Les hommes mourront de peur dans l’attente de ce qui doit arriver au monde, car les puissances des cieux seront ébranlées. Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans une nuée, avec puissance et grande gloire.
Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche. »

Texte d’Évangile tiré du Prions en Église. S’abonner au Prions.

Méditation – La mort peureuse

En priant cet extrait de la Parole, l’annonce que les hommes mourront de peur fait surgir un regret : la rencontre de Manon, il y a déjà quelques décennies. Manon, une amitié improbable sous forme de transparence. Une transparence qui transperce tous les faux prétextes et toutes les convenances. Manon, mon amie, était une Jérusalem. Elle rassemblait des âmes en quête, des âmes en peine, des âmes pleines, autour d’elle. Manon était atteinte d’une tumeur au cerveau. Grosse comme un pamplemousse. Elle m’appelait, tous les jours, me dévoilait sa peur profonde de mourir alors qu’on ne se connaissait à peine. Cet évènement demeure marquant, il est survenu avant mon grand labour intérieur.

J’ai absorbé sa peur et j’ai sombré dans l’opacité d’un optimisme dévoyé. « Ça va bien aller Manon! », lui disais-je sans y croire. Sa peur me renvoyait-elle à ma propre mort ? Alors que l’intimité de nos mondes, le sien, le mien se dissolvait par manque de transparence, j’espaçais nos rencontres, instaurais une distance. La laissant seule, je pris dans mon effroi un chemin de mort. La peur a tant besoin d’être qu’elle prend parfois la forme d’un chemin. Pour certains, elle façonnera même les choix d’une mort vivante, d’un destin éteint.

Pourquoi choisir un chemin de mort ? S’évertuer à marcher dans les ronces en s’appuyant sur une imposture, célébrant une autonomie comme une puissance bricolée et factice. Un chemin où je pose avec peine chacune des pierres, comme autant d’excuses recherchées, retournées au fil de mes pas chancelants et faussement assurés. Un chemin tournoyant autour de blessures, offrant des paysages familiers, si connus, presque réconfortants, à croire qu’il me mènera au salut. Celui que moi je veux et que j’édifie à l’aide d’attentes sablonneuses. Ce chemin ne mène pas très loin, l’enfant aux jambes ensanglantées par les ronces nous y attend, sans consolation, sans fête ni ballons. Il faut de l’Autre en soi, du plus grand que soi, pour soigner l’enfant paralysée et moi. Pour nous ouvrir un chemin neuf et nous donner de l’élan avec le courage d’être, avec ce qu’on appelle la foi. Il nous faut cet Autre en soi qui soit Chemin, guide et consolation à travers les autres. Pour que notre enfant, cette liberté intérieure qui se dilate sous l’inspir de l’Esprit, puisse courir insouciant jusqu’à se perdre quelque part entre la vulnérabilité et l’interdépendance. Quelque part, entre les bras de Manon.

J’aurais tant aimé lui dire qu’au fond, la mort est peureuse. Que devant notre courage d’être soi, d’être l’une pour l’autre jusque dans la mort, nous serons elle et moi plus vivantes que jamais. Elle m’offrait ce cadeau enveloppé d’éternité, celui d’accompagner sa vie jusque dans la mort, jusque dans la transparence du courage, jusque dans la vérité de cette Vie qui nous porte et se poursuit, que je sois vivante ou qu’elle soit morte.  J’y songe encore, trente ans plus tard et j’accueille l’héritage vivifiant de Manon. Le seul chemin est celui de la vérité courageuse. La seule voie est celle de l’abandon à la Vie.

Barbara Martel – bmartel@lepelerin.org



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