No 69 – série 2025-2026
Évangile du jeudi 13 novembre 2025 – 32e semaine du temps ordinaire
« Le règne de Dieu est au milieu de vous » (Lc 17, 20-25)
En ce temps-là, comme les pharisiens demandaient à Jésus quand viendrait le règne de Dieu, il prit la parole et dit : « La venue du règne de Dieu n’est pas observable. On ne dira pas : “Voilà, il est ici !” ou bien : “Il est là !” En effet, voici que le règne de Dieu est au milieu de vous. » Puis il dit aux disciples : « Des jours viendront où vous désirerez voir un seul des jours du Fils de l’homme, et vous ne le verrez pas. On vous dira : “Voilà, il est là-bas !” ou bien : “Voici, il est ici !” N’y allez pas, n’y courez pas. En effet, comme l’éclair qui jaillit illumine l’horizon d’un bout à l’autre, ainsi le Fils de l’homme, quand son jour sera là. Mais auparavant, il faut qu’il souffre beaucoup et qu’il soit rejeté par cette génération. »
Texte d’Évangile tiré du Prions en Église. S’abonner au Prions.
Méditation – Au milieu de nous
En méditant cette Parole : « Le règne de Dieu est au milieu de vous », je ne peux m’empêcher de penser le centre de nos existences, ce cœur profond qui palpite et vers lequel nous nous réfugions pour écouter la respiration de Dieu. Plus qu’un centre, c’est une ancre.
Récemment, nous avons assistés, en famille, à une célébration funéraire 100% laïque d’un parent que je n’ai pas connu mais qu’on m’a dit profondément croyant. Durant la cérémonie, des souvenirs et des gestes dépourvus de profondeur se sont succédé en un étrange rituel. Comme un bricolage rapidement exécuté; la colle, abondamment utilisée, n’ayant pas le temps de sécher. Entre un chanson western choisie au hasard et l’invitation à venir se recueillir sur une guitare, aucune trace, aucune évocation du passage de Dieu pourtant si présent dans la vie de ce parent. Les chaises cordées, les gens repliés sur eux, nous étions tous et toutes là, sans milieu. Les personnes venues demeuraient adossées, muettes, contre le mur, regardant leur montre, chuchotant à propos des enfants trop grouillants. Au milieu de la petite salle désincarnée, que des chaises vides. Nous avons été invités à nous asseoir, plusieurs préféraient se tenir debout à l’arrière. Offrant une place près de moi, l’un de ces inconnus m’avoua qu’en demeurant debout, il serait plus facile de s’éclipser rapidement. Dans la tristesse et l’indifférence, le bricolage morne se mit en branle avec des reflets plus ou moins justes d’une célébrante se débattant dans le non-sens : « vous me semblez une famille unie, c’est beau de vous voir », dit-elle sans ironie.
Puis la petite fille du défunt, étincelante de jeunesse, leva la main, poussée par la Parole qui décentre. Elle demanda à témoigner et quel témoignage! La voix tremblante, les pleurs retenus, elle racontait la joie vécue auprès de ce grand-père non sans travers. Sa petite enfance s’écoula doucement à rouler des cigarettes en compagnie de ce grand-père ou à réciter le chapelet alors que les paroles lui échappaient du haut de ses 5 ans. La clarté de son visage, la tristesse de son rire, l’amour qu’elle irradiait; tout son être semblait annuler d’un trait l’insignifiance de ce qui venait de se dire et de ce qui n’avait pas eu lieu. Le centre de ce grand-père, présenté avec ses appartenances et ses accessoires, s’était dissous. Sa petite-fille, en témoignant avec le Souffle et dignité venait de rétablir un milieu; un milieu foisonnant qui a jailli à partir de l’amour porté à son grand-père. Ce lieu, mi-humain, mi-divin, où l’on pouvait accueillir Dieu au centre d’une vie importante même si méconnue de la plupart d’entre nous. Au milieu de nous, le fils pouvait enfin retourner vers le Père. Au milieu de nous, le Fils pouvait enfin retourner vers ce père et ce grand-père.
À travers ce témoignage inattendu et inouï, le décentrement avait eu lieu; la montagne s’était jetée dans la mer là où cette petite-fille gardait la foi en l’amour de et pour son grand-père. Là où se retrouve l’essentiel de la vie vivante, aux racines mêmes de l’amour gratuit. Les inconnus se sont mis à se parler, certains ont ri, d’autres se sont enlacés et les enfants demeuraient tout aussi grouillants. À travers l’immensité d’un simple témoignage d’amour, les présences de ce grand-père et de Dieu le Père, s’alliaient pour nous donner vie et fraternité, là au milieu de nous. La simplicité d’une parole inespérée nous ancra les uns les autres et nous décentra les uns vers les autres. Cette parole d’amour fut certes un baume pour le cœur profond, mais ce fut surtout, l’arrivée du Royaume au milieu de nous.
Barbara Martel – bmartel@lepelerin.org
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